« Science-fantasy » – « Science fact » – « Speculative fabulation » – « Speculative feminism »

« Le queer pour moi, c’est une porte ouverte vers de nouvelles façons de voir le monde, la famille, les relations interpersonnelles. Quelque part, c’est de la SF au quotidien. Je vois dans le terme une tendre subversion, pour nous élever – c’est politique et révolutionnaire. J’aime bien dire que je fais de la SF queer, parce que c’est un genre dans lequel je me reconnais assez, oui, péter toutes ces barrières, aller au plus près de l’intime, de ces mouvements intérieurs et extérieurs, les galaxies et l’amour. » – Sabrina Calvo

La production de nouveaux récits en rupture avec les institutions établies semble aujourd’hui indispensable à un véritable changement social. C’est en grande partie la littérature SF Queer qui s’efforce d’éveiller les imaginaires en montrant qu’il existe une diversité et une multiplicité de formes communautaires et d’organisations possibles.

De plus en plus, la préfiguration s’intéresse à ces organisations alternatives – coopératives, mouvements sociaux ou communautés intentionnelles pour n’en citer que quelques-unes – qui apparaissent être des réponses désirables aux multiples crises économiques, sociales, environnementales et politiques de notre époque. En effet, « préfigurer » c’est « anticiper une caractéristique d’un monde alternatif dans le présent, comme si celui-ci était déjà réalisé » (Luke Yates).

De la préfiguration à la refonte de nouvelles communautés

S’organiser de manière pré figurative implique d’imaginer des pratiques nouvelles, en rupture avec les pratiques dominantes, faisant appel à des imaginaires alternatifs.

Ursula K. Le Guin, par exemple, n’a cessé, dès la fin des années 60 de se consacrer aux questions politiques et sociales dans le cadre d’histoires utopiques, comme en 1969, dans son roman  » The Left Hand of Darkness  » (La Main gauche de la nuit), le portrait complexe d’une société non genrée.

Par ailleurs, les travaux de Donna Haraway, profondément imprégnée par cette culture littéraire en marge, et pour qui « SF » veut aussi (et surtout) dire « science-fantasy », « science fact », « speculative fabulation » et même « speculative feminism », s’intéresse depuis très longtemps à cette question des alternatives.

Dans son chapitre  » Histoires de Camille  » présent dans son livre  » Vivre avec le trouble « , l’autrice américaine explore un large champ des possibles. Tantôt, les enfants ont trois parents, ce qui fait que la population de la planète diminue de plus de la moitié ; tantôt, des individus reçoivent une transplantation du patrimoine génétique d’espèces animales menacées, contribuant ainsi à la survie de ces espèces etc.

En effet, la manière dont on raconte les histoires fait émerger des possibilités et des illusions qu’il devient possible d’envisager et de son point de vue, c’est en construisant des mondes utopiques qu’on peut s’approcher de leur réalité pour libérer l’espace, donner une voix aux interstices et à la marge et espérer refaire communauté.

« Je vois la science-fiction et la fantasy comme l’instinct d’évolution du zeitgeist. Nous, créateurs, sommes les ingénieurs des possibles. Et maintenant que la SF, même à contrecœur, reconnaît que les rêves des personnes marginalisées comptent et que chacun d’entre nous a un futur, alors ainsi évoluera le monde (très vite, je l’espère). » – Nora K.Jemisin

Podcasts

Queer, Le mauvais genre de la SF | Podcast France Culture
Le tour des mondes d’Ursula K. Le Guin | Podcast France Culture
Les romans qui ont changé le monde : « La Main gauche de la nuit » | Podcast France Culture

Documentaire